Ce soir, on a la flemme de faire à manger...
Mais c'est délicat de l'avouer aux enfants de cette manière : on risque de passer pour des parents indignes et des feignasses. C'est moche.
Nous décidons donc de leur présenter les choses sous un angle légèrement différent, en tournant la chose à notre avantage : «Les enfants ? Si vous rangez tous les jouets qui traînent par terre dans vos chambres, on ira au resto...»
(Technique approuvée par Marcel Ruffo)
En moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire, les 14 kilos de poupées et de Power Rangers jonchant le sol atterrissent dans leurs bacs de rangement, le tout ponctué par des hurlements stridents «Ouiiiiiiiiiiiiiiiiiii ! Ouiiiiiiiiiiiiii ! Resto resto !!!!»
Mais aller au restaurant avec de jeunes enfants n'est pas un acte anodin, on pourrait même dire qu'il s'agit d'une expérience bien particulière...
Il faut déjà bien choisir le lieu :
On oublie évidemment les petits restos romantiques et branchés à la déco cosy, réservés aux dîners en tête à tête avec madame (Vous savez, ceux qu'on ne peux plus fréquenter qu'une fois par an environ, après avoir lâché 50 euros à une Baby Sitter...)
On évite aussi le Mc Donalds et son aire de jeu infestée d'enfants criards en chaussettes, faisant du toboggan dans des gouttières géantes maculées de vomi « Croque Mc Do - Mc Flurry» fraîchement régurgité par les petits camarades.
On trouve alors un juste milieu et on opte pour une valeur sûre : l’établissement franchisé, situé dans un grand centre commercial, ce qui permet de faire un peu les boutiques avant de manger, histoire de fatiguer un peu les 2 tornades.
C'est donc après quelques courses que nous pénétrons dans le restaurant, la smala sous le bras.
A peine le seuil de l'établissement franchi, l'ensemble du personnel est déjà sur les dents et se passe le message «Alerte générale ! 2 casses-couilles + 2 enfants + 3 doudous + 1 poussette + 1 sac à langer + 3 gros sacs plastiques Okaïdi en vue !!!!».
En bon professionnel, le responsable de salle nous accueille avec un grand sourire.
Il nous propose alors la place stratégique, située en bordure de galerie marchande (entre le Yuka en plastique et le chevalet affichant les plats du jour) en usant de l'habile formule : «Ici ça ira ? Vous aurez de la place pour poser la poussette...»
(Traduction : «C'est bien là, vous ne ferez pas trop chier les autres clients»).
Alors les premières fois, en bons parents débutants, on accepte volontiers ce type de place et on découvre les joies du dîner en plein courant d'air, au milieu des caddies et annonces micro relatives au petit Brian qui a perdu sa maman..
Mais nous ne sommes plus des bleus et dégainons la formule imparable pour contrer le stratagème du restaurateur famillophobe :
«Non, plus vers le centre de la salle s'il vous plaît, on va plier la poussette ça ira !»
(Le tout accompagné d'un grand sourire niais, ça passe mieux)
| Note : Vous pouvez également utiliser la formule suivante, moins diplomate mais tout aussi efficace : «Sinon on peut déplacer la table jusque dans la galerie marchande si tu veux, j'adorerai bouffer en face du pressing !». |
Une fois installés, vient le moment de choisir les plats.
Simple formalité... pour papa et maman.
Quant aux enfants :
Balthazar : « Moi je veux une PizzaR » (ne me demandez pas pourquoi les gosses mettent un « R » à la fin de Pizza, c'est génétique je crois)
Papa : « Ce n'est pas possible Balthazar, il n'y en a pas ici... »
Balthazar : « Oui mais je veux une PizzaR ! »
Papa : « Tu veux pas des nuggets c'est mieux, non ? »
Balthazar : « Nan ! C'est nul les Muggets !!! »
(Et là tu te rappelles soudainement du scandale qu'il a tapé la semaine précédente chez Pizza Hut lorsqu'il trouvait les PizzaR nulles et voulait des Muggets...)
Papa : « Et avec des frites ? »
Balthazar : « ...Et du ketchup ? » ( Balthazar Translator On = «Marché conclu !»)
Pétronille : « Ouiiiiiiiiiiiiiiiii F'ites quécheup !!!!! »
Le choix étant entériné, le serveur vient prendre la commande, c'est alors que se produit ce moment bien particulier que l'on a tous vécu...
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Pas rancunier pour un sou, le con... heu... le serveur nous amène nos apéros assez rapidement, ainsi que la fameuse petite boîte de crayons de couleurs pour occuper les enfants (Une boîte pour 2, c'est tellement mieux pour favoriser le dialogue entre frère et sœur...)
Histoire de pimenter un peu notre apéro, il amène aussi une coupelle de cacahuètes qu'il pose à portée des enfants, m'obligeant à leur retirer en urgence préférant éviter si possible d'avoir à mettre en œuvre la trachéotomie au couteau à steak vu dans l'épisode 4 de la saison 3 de Dr House (celui où le patient avait en fait un lupus...)
Évidemment je passe pour un bourreau («On veut des cacaettes papa ! Des cacaettes !!! Ouiiiiiin !!!») et je suis obligé de les manger super discrètement, ce qui gâche un peu la dégustation...
Le temps commence à sembler long, les apéros sont presque terminés, le demi Ice Tea de Balthazar - victime d'une manœuvre malheureuse - a définitivement imbibé son set de table en papier et les serviettes de toute la tablée, nous obligeant dans un souci d'équité à diviser le demi Ice Tea de Pétronille en 2 quarts d'Ice Tea (je pense que les nuls en maths viennent de décrocher...)
Pétronille a quant à elle préféré faire des confettis de son joli set de table, sans doute en prévision du prochain réveillon.
Chouette idée si elle n'en avait pas mis une grosse poignée dans mon Mojito à 12 euros.
Nos plats arrivent enfin...
Balthazar : « Papa, pipi ! »
Papa : « Mais tu ne pouvais pas le dire avant ? On va manger froid ! »
Balthazar : « Je peux pas me retenir ! Pipiiiiii ! »
Après cette interlude urinaire, nous revenons donc à table.
Ma viande est logiquement froide, les nuggets aussi mais ça ne semble pas très important pour les enfants qui après avoir mâchonné 3 frites au Ketchup me disent de concert : « Papa on n'a plus faim ! »
Et pour cause, la corbeille de pain a été vidée pendant l'apéro, en guise de consolation face à la privation de cacahuètes sans doute ...
Malgré tout ils ne sont pas contre un petit dessert, que nous tentons de choisir parmi ceux proposés dans leur menu :
Papa : « Vous voulez quoi en dessert ? Une gaufre ? Une glace ? Du fromage blanc ? »
Pétronille : « Gauf ! Gauf ! »
Balthazar : « Nan moi je veux du fromage blanc ! »
Papa : « Heu... mettez-vous d'accord... Vous partagerez. »
Pétronille : « Gace ! »
Balthazar : « Ah ouais une glace aux Smarties ! »
Papa : « Oui mais non, les glaces au Smarties c'est à la maison, ici ce sera une glace normale... »
Pétronille et Balthazar : « Ouiiiiiiiiiin !!! »
Les desserts commandés depuis maintenant plus de 20 minutes, nous ne voyons toujours rien à l'horizon...
Les enfants fatiguent, les parents aussi et à ce rythme on ne sera pas rentrés pour la finale de Koh Lanta (il y a des choses importantes dans la vie...)
Papa : «Balthazar, tu penses que le Petit Poney que Pétronille est entrain de coiffer est plus fort que ton Power Rangers à la bagarre ?»
Balthazar : «Heu !? Chai pas...»
Papa : «Et si tu essayais ?»
Pétronille : «Hiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii ! A Pomeeeeeey ! C'est à moiiiiiii ! Ouiiiiiiiiiiiiin !!!!!!»
Balthazar : «Nan donne le moiiiiiii ! Bagarreeeeeeeeeeeeee !»
La manœuvre est efficace : les consignes fusent en cuisine : «Merde y a les marmots de la 42 qui braillent, envoyez vite leurs desserts et dégagez moi la famille Bidochon rapidement !»
30 Secondes après les desserts de «la 42» sont sur la table, ce qui signe l'armistice entre Petit Poney, Power Rangers et leurs propriétaires respectifs.
Mais la crêpe banane Nutella chantilly de papa à quand même l'air vachement meilleure que la glace à l'eau parfum fraise chimique des enfants...
Pétronille : « Papa genoux ! »
Balthazar : « Papa je veux goûter ! »
Pétronille : « moi 'si ! »
Balthazar : « Papa encore !»
Pétronille : « Enco ! Enco ! Sluuuurp »
1 cuillère
2 cuillères
3 cuillères
4 cuillères…
La crêpe est finie, Balthazar et Pétronille ont du Nutella plein les moustaches alors que je n'ai pu manger qu'un coin de crêpe même pas chocolaté...
Je me «console» avec leur glace ignoble qui a le mérite de m'anesthésier la langue ce qui la rend moins dégueulasse...
Enfin, je règle l'addition, en prenant soin de laisser un généreux pourboire au serveur (non, je déconne...), et nous faisons retour à la maison où nous pouvons digérer face à Koh Lanta alors que les enfants sont tranquillement au lit...
Et à 22h00, une petite voix émane d'en haut de l'escalier :
« Papa, Maman, j'ai faim... »
FAIM
heu pardon...
FIN
Signalétique adaptée, visible dans de nombreux restaurants :
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| EDIT : |
| Résultat du dernier restaurant en famille : Pétronille 1 - Set de table & serviettes 0 |
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| Comme quoi je n'invente rien... |
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